Assez curieusement, l'introduction du virtuel dans le cinéma lui enlève chaque jour de sa sincérité et, à l'inverse, et même laborieusement, l'arrivée des acteurs dans le jeu vidéo, donne un peu plus de réalité au jeu vidéo. Les deux médiums se rejoignent donc en effet quelque part sur un terrain un peu commun à mi chemin du réel et du virtuel et c'est peut-être à ce carrefour que James Cameron et Peter Jackson croient possible d'attraper une nouvelle essence.
Les deux médiums peuvent effectivement profiter l'un de l'autre pour explorer un peu plus leur condition mais c'est forcément une erreur de croire, pour résumer, qu'il manque l'émotion cinéma au jeu vidéo et l'interactivité au cinéma et que d'une fusion des deux modes d'expression surgira une entité plus efficace ou plus légitime. La fusion artistique semble pourtant possible entre jeu vidéo et cinéma pour Lorne Lanning qui après dix ans de jeu vidéo Oddworld (Abe, Munch, Stranger), se tourne, à l'inverse de la tendance, vers le cinéma pour mettre en scène son film Citizen Siege (jeu également), mais "elle viendra des créateurs indépendants, pas des grosses entreprises" (studios de cinéma ou éditeurs de jeux vidéo) précise-t-il dans le mensuel Chronic'art (31, décembre 2006).
Il faudra bien tout le talent de créateurs innovateurs comme James Cameron et Peter Jackson pour dépasser des syndromes de la convergence que le cinéma et le jeu vidéo ont déjà connu avec, notamment, le tristement célèbre Dragon's Lair (en arcade sur disque laser dès 1983), un dessin animé où il fallait appuyer de temps en temps sur un bouton pour déclencher une séquence, ou les risibles "jeux" psychorigides intégrants des séquences vidéos (FMV) vaguement interactives (Night Trap, 1994).
Les amateurs de cinéma et les gamers se toisent déjà avec circonspection et même, souvent, un mépris silencieux. Aussi cousins qu'ils soient, comme le démontre chaque adaptation vulgaire d'un film en jeu ou d'un jeu en film (ou directement en DVD comme le seront les prochaines et sans doute désolantes productions de Uwe Boll: Bloodrain 2, Alone in the Dark 2…), tout amalgame malheureux entre le jeu vidéo et le cinéma prend le risque de les transformer plus durablement en frères ennemis.
Au delà du tabou qualifié d'inceste, marier les membres d'une même famille est médicalement prohibé pour éviter la naissance d'un être consanguin fragile, voire, génétiquement, dégénéré. Le cinéma et le jeu vidéo appartiennent sans conteste à la même famille et le partage de leurs ressources naturel, mais pour garder leur intégrité et leur qualité réciproque, n'auraient-ils pas plutôt intérêt à rester à distance ?
Commentaires
L'union du cinéma et du jeu vidéo est quelque chose de très fascinant à mes yeux. Il a donné un excellent The last of Us et de nombreux autres exemples très inspirés. Y compris en termes de budgets, certaines productions ont des budgets pharaoniques : les fonds utilisés pour Destiny en communication et développement montrent toute la collusion des intérêts et enjeux.